Défaillances d’entreprises : le pire n’est pas encore certain

Jean-Marc Pierret
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A en croire la récente étude d'Altares concernant les défaillances d’entreprises au 1er trimestre 2021, l'artificielle bonne santé des entreprises sous perfusions s'étiole et l’hécatombe attendue semble commencer. Mais l'après-vente a des atouts pour mieux passer entre les gouttes que d'autres secteurs....
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Celui qui sortirait d'un coma de 12 mois en découvrant cette info aurait l'impression d'être revenu aux 30 Glorieuses. Cette courbe publiée par Altares montre qu'en 10 ans, jamais il n'y a eu aussi peu de défaillances d'entreprises en France. Fin 2020, le chiffre atteignait même son « plus bas niveau en 30 ans », rappelle la société d'études. Malgré trois confinements, il y a eu 32,1 % de défaillances en moins entre avril 2020 et mars 2021 par rapport à la période avril 2019/mars 2020 (28 800 contre 48 518).

Fin de l'embellie en trompe-l’œil ?

Altarès, qui publie régulièrement ces chiffres, nous a bien sûr habitués à les relativiser. Cette baisse drastique des difficultés d'entreprises, alors même que sévit « la-crise-économique-la-plus-violente-depuis-la-dernière-guerre », est artificiellement entretenue par les aides massives distribuées depuis le début de la pandémie.

Mais cette fois, l'embellie en trompe-l’œil semble sur le point de se terminer. S'il n'y a eu que 7 406 défaillances au premier trimestre 2021 contre 10 902 un an plus tôt, mars vient de vivre un inquiétant fléchissement. Sa deuxième quinzaine affiche une augmentation des défaillances de +155 %. Pire : les mises en liquidation directes viennent d'exploser de +211 % ! Depuis le mois dernier, « 79 % des jugements mènent désormais à la liquidation de l'entreprise », s'inquiète Altares. Et cette fois, c'est ce chiffre catastrophique qui « n'a jamais été atteint en 20 ans »...

Altares craint des lendemains d'autant plus difficiles qu'elle recense en France quelque 63 000 entreprises dites “Zombie”, c'est-à-dire survivant tellement artificiellement par les aides de l’État que l'arrêt de ces dernières leur sera probablement fatal. Soit presque 10 % des 664 000 entreprises françaises qui ont sollicité des PGE pour un montant total de 135 milliards d'euros. Déjà, la Banque de France estime que 4,5 % à 6 % de ces prêts auront du mal à être remboursés...

Relativiser les risques en après-vente

Cela dit, restons calme. Le monde de l'après-vente automobile a de bonnes raisons de se penser moins concerné par cette grande fragilité économique que bien d'autres secteurs dévastés par les fermetures et la chute de fréquentation.

Certes, les carrossiers vivent encore des jours pénibles ; certes encore, l'amont des équipementiers digère péniblement l'effondrement des chaînes de production automobile ; certes toujours, le business model des concessionnaires et dans une moindre mesure, des agents, n'est guère adapté à l'effondrement du CA VN et VO récents pendant que leur seule après-vente n'est pas en mesure d'endiguer les hémorragies financières. Sans oublier bien sûr la difficile situation de certains services de l'automobile, tels les entreprises de location courte durée dont les défaillances viennent de bondir de +30 %, alerte Altares.

Sauv: procédure de sauvegarde; RJ: redressement judiciaire; LJ: liquidation judiciaire (source Altares). Sauv.: procédures de sauvegarde; RJ: redressements judiciaires; LJ: liquidations judiciaires (source Altares).

Le tableau ci-dessus n'est guère encourageant. Le « commerce et la réparation de véhicules » n'affiche qu'un faible recul des difficultés d'entreprises et le taux de liquidations judiciaires (79,8 %) n'est certes pas le pire, mais pas vraiment le meilleur.

Le soutien des automobilistes

Reste que ce chiffre cumule les entreprises de ventes VN et VO avec la réparation. Dans l'après-vente pure et dure, la distribution de pièces comme les ateliers multimarque ont subi et subissent encore des reculs d'activité gérables. Et les automobilistes, toujours plus sanitairement prompts à rouler en voitures qu'en transports en commun, continuent vaille que vaille à consommer du kilomètre, générer des sinistres et faire retaper leurs autos actuelles, voire même remettre en état de vieilles guimbardes. De bons signaux, a fortiori dans un pays où 90 % des 34 000 communes n'offrent de toute façon guère d'alternatives crédibles de mobilité.

On saura très vite comment la rechange et la réparation évoluent. Si hélas Altares a probablement raison d'annoncer le début d'une explosion des défaillances d'entreprises, son prochain bilan trimestriel de début juillet permettra de voir plus précisément comment le secteur du commerce et de la réparation résiste par rapport au reste de l'activité économique...

Pour retrouver les autres analyses trimestrielles d'Altares, cliquez ici

Jean-Marc Pierret
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