Recours direct : stage œcuménique à la FNAA 06

Romain Thirion
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Les présidents nationaux des branches Carrosserie du CNPA, de la FNAA et de la FFC ont été réunis, le 24 mars dernier, par le président du SEAI, Karim Megrous et la FNAA , pour assister à un stage de sensibilisation et de formation au recours direct. L’occasion, pour les trois syndicats de réparateurs, d’en apprendre davantage d’une procédure qui permet aux différents professionnels et à l’automobiliste victime d’un choc non responsable d’obtenir un règlement au centime près.
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Il en a fallu, du temps ! Des années, même, pour qu’enfin soient réunis autour d’une même table les différentes branches syndicales de carrossiers sur un thème pourtant libérateur pour l’ensemble de la profession. La procédure de recours direct, en effet, reste l’un des principaux contrefeux à la mainmise des assureurs et de leurs plateformes de gestion de sinistre dans les accidents auto matériels et non-responsables.
Un plateau national !
Et c’est dans les locaux de la FNAA 06, à l’invitation de Claude Alzina, son président, et sur la sollicitation de Karim Megrous, président du Syndicat des experts en automobile indépendants (SEAI) que l’événement s’est déroulé. Un véritable stage de sensibilisation et d’information, où la méthodologie du recours direct destinée aux réparateurs leur a été présentée en détails. Etaient notamment présents dans l’assistance :
  • Marie-Françoise Berrodier, présidente de la branche Carrosserie Tôlerie Peinture de la FNAA, assistée de Carole Berrodier, responsable de branches métiers du syndicat ;
  • Roger Robles, vice-président de la même branche ;
  • Yves Levaillant, président de la branche Carrossiers du CNPA, assisté de Ouaïba Sardi, secrétaire générale de la branche ;
  • Yves Riou, responsable du pôle contrôle, maintenance et réparation au CNPA ;
  • Patrick Nardou, président national de la FFC Réparateurs, assisté de Christophe Bazin, chargé de mission pour l’organisation professionnelle ;
  • Jean Païs, président de la FFC Réparateurs de Lyon
Tout est dans le Code… des assurances !
L’expert y a présenté sa méthode pour mener une procédure de recours direct, avec l’appui de Me. Nathalie Amill, avocat au barreau de Draguignan. Laquelle l’a aidé à construire l’argumentaire juridique nécessaire au bon déroulement du recours. La même qui porte ses dossiers devant les tribunaux en cas de résistance de l’assureur à l’injonction de payer l’assuré victime. Pour rappel, le recours direct permet à cette victime d’un sinistre non responsable de réclamer directement à l’assureur de l’assuré 100% responsable, constat signé par les deux parties à l’appui, le montant exact du préjudice subi.Comme en dispose l’article L124-3 du Code des assurances. Sans avoir à déclarer le sinistre à son propre assureur, comme le confirme l’article L113-2 du même Code. Et en contournant donc les fameuses conventions IRSA. «Nul besoin de tiers : le seul interlocuteur est l’assureur du responsable. La loi dite "Badinter" du 5 juillet 1985 n’oblige pas à saisir son assureur pour les dégâts matériels subis par la responsabilité d’un autre assuré.»
Un enjeu national
Ce faisant, la procédure permet au réparateur et à l’expert de facturer leurs interventions à leurs tarifs publics. Et non plus aux taux horaires remisés, négociés dans le cadre de conventions d’agréments avec des compagnies ou mutuelles d’assurance, ou des plateformes de gestion de sinistres. Les sommes pouvant être réclamées dans le cadre d’un recours direct étant généralement les suivantes : frais de remise en état du véhicule, frais d’expertise, frais de location d’un véhicule de gamme similaire, frais de dépannage, dévaluation de la valeur du véhicule, frais d’avocat, frais de gardiennage…Autant de raisons suffisantes pour que la question devienne véritablement un enjeu national pour la profession de réparateur automobile. «Mais attention à ne majorer aucun chiffrage : celui-ci doit être au plus juste des tarifs publics que pratiquent l’expert, le réparateur, le dépanneur, le loueur et, bien sûr, au plus près du préjudice subi», insiste Karim Megrous, méfiant quant aux commissions trop souvent prélevées par les plateformes de recours direct. «Je ne suis pas l’expert du réparateur et j’insiste sur ce point», ajoute-t-il. «Cette procédure, telle qu’elle vous est présentée ici, est le fruit d’un long travail de Karim Megrous et de Me. Amill, a souligné Claude Alzina, en ouverture de ce stage de sensibilisation et d’information. Aujourd’hui, le recours direct est une arme qui a fait ses preuves. Elle est incontestable dans la lutte contre les pressions assurantielles qui pèsent sur le métier.»
Indépendance, le maître-mot
Me. Amill a rappelé, elle, son expérience en matière de recours, d’abord sur les sinistres corporels et depuis bientôt quatre ans sur les sinistres matériels. Et surtout, elle a rappelé l’importance de l’indépendance dans la pratique du recours direct. Indépendance vis-à-vis des assureurs, d’abord, mais aussi des professionnels de la réparation auto… et des syndicats d’avocat. «Mon cabinet, Ferlaud, Ménabé, Amill, n’est adhérent d’aucun syndicat ni proche d’aucune force politique, a-t-elle déclaré. Je suis spécialisée dans l’indemnisation des victimes. Aussi je refuse tout travail pour des assureurs : je revendique cette liberté autant que mon socle de compétences. Je ne ferai donc jamais office d’avocat-conseil pour l’une de vos organisations professionnelles.»Une indépendance qu’a justifiée également Karim Megrous au nom du SEAI. Ce qui n’empêche pas, toutefois, les experts indépendants du syndicat de dialoguer avec les organisations professionnelles de réparateurs. Et Me. Amill d’ajouter : «je fais simplement en sorte que mes connaissances servent à votre métier, rien qu’à votre métier, et que la procédure soit employée en toute compétence». A l'inverse, ici, de certaines plateformes de recours direct qui, en ayant fait preuve de mauvaise gestion des dossiers et en privant leurs intervenants de leur juste rémunération, ont pris le risque de mettre en péril l’image du recours direct et ont fermé peu de temps après, comme Recours-direct.org. Ainsi que certains réparateurs ou experts tentés d’assigner les assureurs de personnes responsables de sinistres sans s’être assuré de la solidité juridique de leurs arguments et de la totale irresponsabilité de leur client dans l’accident.
Aucune «lourdeur» juridique
«Lorsque la procédure est faite selon la méthodologie stricte que nous avons fixée, l’avocat n’intervient qu’à la fin, au moment de porter le dossier devant le tribunal, précise-t-elle, pour couper court à toute apparence de lourdeur juridique dans le recours direct. Et si tout se passe bien, quand l’assureur accepte de régler le préjudice, l’avocat intervient très peu. Il faut que vous soyez certains de l’irresponsabilité de votre client dans le sinistre.» Les règlements, dans plus de 90% des cas, se font sans passer par la case justice, selon Karim Megrous. Ce dernier et Me. Amill ont d’ailleurs tenu à souligner que le recours direct «est inscrit dans la loi : nous n’avons rien créé, seulement mis en œuvre une méthode qui permet d’exploiter les textes de loi, inspirés par le droit européen».Car c’est bien l’Union Européenne qui, par la directive n°2005-14 du 11 mai 2005, a imposé la mise en place, en droit français, de ce type de recours. Dans le cadre de “la responsabilité civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs, et au contrôle de l'obligation d'assurer cette responsabilité”. «Donc, quand un assureur vous dit que le recours direct n’existe pas, soit il ne le connaît pas, ce qui pose la question de sa compétence, soit il vous ment», affirme Karim Megrous. Lequel a d’ailleurs félicité Me. Amill pour son taux de 100% de réussite dans les dossiers de recours direct ayant dû être menés devant les tribunaux.
15 à 20 jours de traitement
«Ce que nous faisons, au travers de cette procédure, c’est la normalité ailleurs en Europe», a martelé le président du SEAI. Qui a d’ailleurs tenu à calmer les craintes de bon nombre de réparateurs, relayés par les présidents de branche présents. «En moyenne, d’expérience, quand la dynamique est enclenchée, le traitement d’un dossier de recours direct sans passage par la case justice peut s’effectuer entre 15 et 20 jours, souligne-t-il. Ce qui n’est pas plus long que le traitement d’un dossier dans le cadre des conventions IRSA.»Et en cas de nécessité de porter le dossier devant le tribunal, l’expert comme l’avocat ont insisté : privilégier les tribunaux d’instance, pour une question de rapidité de traitement. Et non plus les juridictions de proximité, où siègent des juges non professionnels et ne permettant aucune voie de recours dans le cadre de dossiers où des sommes d’argent sont réclamées.
Romain Thirion
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