Le Diesel sans NOx de Bosch sauvera-t-il aussi Rodez ?

Romain Thirion
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Victime collatérale du Dieselgate et de la chute du marché des véhicules diesel, l’usine Bosch de Rodez, dans l’Aveyron (12), spécialisée dans ce type de motorisations, pourrait voir son avenir conforté si l’ingénieux système de réduction drastique des NOx présenté par Bosch venait à remettre en question les politiques publiques en matière de diesel. Si, et seulement si…
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Menacée par les répercussions du Dieselgate sur sa maison-mère et par l’irrémédiable chute du marché des véhicules diesel qui s’en est suivie, l’usine Bosch de Rodez avait vu son activité réduite puis connu une longue grève entre la fin 2017 et le début de 2018. Le site et ses 1 600 collaborateurs avaient remporté une première victoire cet hiver en obtenant du groupe allemand un investissement de 14 millions d’euros destiné à la rénovation de l’une de ses deux lignes de production d’injecteurs.Après l’obtention d’autres garanties par l’intersyndicale, la grève a officiellement pris fin le 23 mars dernier. Une victoire pour « un site de haute qualité, le premier en France à avoir gagné trois fois le prix EFQM de la qualité et de la performance industrielle en France », comme l’a rappelé Heiko Carrie, président de Bosch France Benelux, lors de la présentation des résultats annuels de Bosch France, le 3 mai, à Drancy (93). « Notre volonté était de préserver l’activité autant que nous le pouvions, aussi nous allons conserver la grande majorité de nos collaborateurs en modernisant l’activité existante mais aussi en diversifiant les activités de cette usine », ajoute Heiko Carrie.
L’espoir du nouveau système anti NOx
Mais une autre bonne nouvelle pourrait venir éclaircir le ciel des employés du site ruthénois : le système de réduction des NOx présenté par Bosch lors du Symposium Moteur de Vienne 2018 et annoncé à grands renforts de chiffres venant démontrer son efficacité par Volkmar Denner, président du directoire de Bosch, à la fin du mois d’avril. « La perspective du développement d’une telle technologie facilite la vie du site de Rodez, où l’on veut maintenir le maximum d’emplois, insiste Heiko Carrie. Si l’on peut donner une deuxième vie au diesel grâce à notre système de réduction des NOx, Rodez ira mieux, mais la pérennité de l’usine passe d’abord par le changement de technologie des injecteurs et par l’accord avec les représentants du personnel pour moderniser l’une des deux lignes de production. »L’avantage non négligeable de la technologie présentée fin avril dernier est qu’elle ne nécessite aucun équipement nouveau pour parvenir à ces extraordinaires taux minima de 13 mg/km et de 40 mg/km en condition réelle (selon le cycle d’homologation RDE – "Real drive emissions"). « Nous voulons maintenir ouvertes les portes des grandes villes aux véhicules diesel, d’autant que le diesel reste aujourd’hui la plus performante et la plus abordable des technologies pour réduire les émissions de CO2 », affirme Rémy Schmitt, expert diesel de la division Powertrain de Bosch. « La technologie est d’ores et déjà disponible, avec des équipements qui existent déjà et ne coûtent pas plus cher, souligne Heiko Carrie. Il y a bien sûr une hausse de la consommation de carburant pour y parvenir mais elle ne dépasse pas les 1% selon le protocole RDE, donc il n’y a pas de raison de bannir le diesel des villes. »
Obtenir des concessions sur le terrain politique
Oui, mais encore faut-il les persuader, ces politiques locaux, qui seront bien moins compliqués à convaincre que les constructeurs avec qui Bosch discute déjà. L’attitude va-t-en-guerre de la Maire de Paris, Anne Hidalgo, vis-à-vis du diesel, ainsi que l’ambition de certains bourgmestres d’Outre-Rhin d’interdire à leur tour les véhicules diesel de circuler dans leurs grandes villes, s’apparente à un véritable mur idéologique. Ce à quoi Heiko Carrie réplique qu’ils « doivent considérer le problème avec les chiffres sous les yeux plutôt que sous le coup de l’émotion : le diesel reste la technologie la plus pertinente pour limiter les émissions de CO2 ».Le problème, toutefois, n’est plus seulement politique, puisque le marché des véhicules diesel neufs accuse un recul massif en Europe au premier trimestre 2018 (-17%). La France limite la casse, mais enregistre elle aussi une baisse de 11% des ventes sur les trois premiers mois de cette année, selon les chiffres de l’ACEA (Association des constructeurs européens d’automobiles) publiés ce 3 mai. « C’est un paramètre qu’il faut prendre en compte et le marché doit absolument se stabiliser pour pouvoir favoriser le maintien d’une large activité sur le site de Rodez », précise Heiko Carrie. Les NOx apparaissent donc drôlement plus simples à maîtriser que la psychologie des acheteurs d’automobiles, finalement.
Romain Thirion
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