Carburant – Bioéthanol E85 : l’éco activité

Jean-Marc Felten
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Les biocarburants n’ont pas une grande notoriété auprès du public. Effrayant l’agriculture “bio” pour des dégâts sur la production alimentaire, l’usage et la production des biocarburants pèche surtout d’un manque d’explications et de communication. Rencontre avec un équipementier et avec l’IFP sur le sujet …
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Engendrant plus de consommation malgré un carburant largement détaxé, les biocarburants peinent à trouver leur place aussi bien chez les automobilistes et les constructeurs que chez les distributeurs de carburants. Alternative au GPL, gaz naturel et bio-diesel, le super éthanol E85 présente pourtant des avantages et une simplicité que les usagers et les réparateurs devraient connaître. Au travers de la présentation d’un boîtier d’adaptation (le FlexFuel), la rédaction vous livre les éléments nécessaires à une meilleure compréhension du bio-éthanol. Et, peut-être, ouvrir des perspectives à d’un chiffre d’affaires complémentaire…
Les biocarburants
Les biocarburants sont des carburants carbonés issus de la végétation (ou «bio masse») et donc considérés comme non polluants (en matière de CO2) car la nature consomme le CO2 émis pour reconstituer les plantations exploitées. Les biocarburants ont été créés en utilisant en premier lieu des plantes facilement exploitables pour la production. Cette exploitation peut être contraire à la production alimentaire, aussi des recherches ont-elles été menées pour produire des biocarburants à partir des déchets inexploités.Aujourd’hui, les biocarburants utilisés en automobile, en France, le sont dans le biodiesel B7 (introduction jusqu’à 7% d’esther méthylique d’huile végétale, ou EMHV, dans le carburant à la pompe) et dans les essences à 5% dans le «sans plomb SP95», le «sans plomb SP98», et à 10% dans le «sans plomb SP95 E10».Enfin, un circuit spécial propose le «superéthanol» E85 qui contient 60 à 85% d’éthanol. Ce dernier carburant doit être utilisé sur des véhicules spécialement adaptés pour ce type de carburant.
Les adaptations moteur
Les véhicules diesel ne reçoivent pas d’adaptations particulières pour les biodiesels. Des flottes captives (entreprises ou administrations) peuvent même utiliser un mélange allant jusqu’à 30% d’EMHV (Esther méthylique d’huile végétale). Les moteurs essence ont besoin d’une adaptation quand le taux d’éthanol est supérieur à 10%. Plus simple à gérer que les adaptations au GPL ou au gaz naturel, le superéthanol E85 ne requiert qu’une adaptation des paramètres d’injection, que les fabricants de post-équipement réalisent avec un boîtier électronique monté en série sur le système de gestion moteur.
FlexFuel : un boîtier universel
Le boîtier FlexFuel a été créé en 2009. Depuis, de nombreuses améliorations ont été apportées et l’équipement est désormais reconnu par l’UTAC et reçoit une certification CE, ISO 9001 et TUV. 27 000 boîtiers ont été commercialisés et posés et un réseau de 300 garages partenaires en assurent le montage et l’homologation. La conversion et l’usage du superéthanol permet de bénéficier de conditions fiscales spécifiques. Dans de nombreux départements, la carte grise peut être d’un coût réduit, voire gratuite comme un véhicule électrique. Pour les sociétés, la TVS est réduite.Enfin, les taxes appliquées sur la distribution de carburant sont très réduites, et le prix du litre d’E85 est quasi moitié moindre de celui du «super» classique. Dans le bilan, on prendra en compte la consommation légèrement supérieure (10 à 20% de plus) pour comptabiliser le bénéfice d’un équipement évalué à 700 euros pour l’utilisateur, et qui peut apporter un bénéfice de 250 euros au monteur.Au cœur du fonctionnement du FlexFuel, un petit boîtier électronique à monter sur le système d’injection.Au cœur du fonctionnement du FlexFuel, un petit boîtier électronique à monter sur le système d’injection.
Montage
Le boîtier est livré spécifiquement en fonction de la norme du véhicule (Euro 3 minimum) et du nombre de cylindres (4 ou 6). Un faisceau est fourni pour raccorder sur le circuit d’injection d’origine, sur une alimentation et une masse. Après le montage, une phase de mesure puis de réglage est nécessaire, pour laquelle il est impératif d’utiliser un logiciel de programmation pour le calculateur de correction.Le boîtier FlexFuel en place, discret. Il est en outre rapide à poser (2heures de main d’œuvre).Le boîtier FlexFuel en place, discret. Il est en outre rapide à poser (2 heures de main d’œuvre).
Une reconnaissance UTAC
Plusieurs boîtiers d’adaptation au carburant E85 sont homologués par l’UTAC et reconnus pour bénéficier des avantages fiscaux sur les cartes grises et les taxes sur les sociétés. Cette homologation n’apporte aucun avantage sur le contrôle technique. Lors de l’homologation des véhicules «flex fuel», les mesures de pollution sont même réalisées 2 fois, avec de l’essence traditionnelle et avec l’E85. Si la consommation est légèrement supérieure (+10 à 15%), les émissions de CO2 et des autres polluants restent dans des valeurs normales.
Et le mécano ?
Comment le mécano doit appréhender le montage d’un boîtier E85 ? Pour ce qui est des autres équipements du moteur, aucun changement n’intervient. En cas de problème moteur, le diagnostic se fera à l’identique. La commande d’injection est inchangée et la correction effectuée se fait en toute transparence, les paramètres relevés ne sont pas changés. Se découvrir une ambition de poseur n’est donc pas insurmontable. FlexFuel assure la formation, le suivi et l’assistance de son réseau d’installateurs (tous des réparateurs). Le boîtier est facturé à partir de 700 euros au client, monté et réglé, et apporte au garage environ deux heures de main d’œuvre.
Parole d’expert
Julian Kashdan, Chef du département Systèmes de combustion et adéquation carburants à l’IFPEN, Laurie Stark, chef de projet adéquation moteur-carburant à l’IFPEN.«IFP Energies nouvelles (IFPEN) est un acteur majeur de la recherche et de l’innovation dans le domaine du transport et travaille notamment au développement de nouveaux couples moteur/carburant à faibles émissions et à forte efficacité énergétique.Un des paramètres-clé pour les carburants est le pouvoir énergétique, qui représente la quantité d’énergie dégagée par unité de masse ou de volume du carburant lors de sa combustion. Or l’éthanol a un pouvoir énergétique plus faible que l’essence à cause de l’oxygène présent dans la structure chimique. Ainsi pour brûler à la stœchiométrie, il faut mettre plus de carburant.Un second paramètre d’importance pour les moteurs essence est l’indice d’octane qui représente la capacité du carburant à résister à l’auto-inflammation. Les carburants à haut indice d’octane sont donc ceux recherchés, ce qui est le cas de l’éthanol.Les boîtiers agissent en corrigeant, donc en augmentant, les masses injectées de carburant pour compenser la perte en pouvoir énergétique de l’éthanol. Cependant tout l’intérêt de l’éthanol n’est pas mis à profit avec les boîtiers car il n’y a pas de correction de phasage à l’injection qui permettrait de bénéficier de l’octane plus élevée, bénéfique pour un gain en rendement. Les boîtiers permettent l’utilisation du carburant E85 en parant au principal effet perturbateur de l’éthanol, mais n’exploitent pas au maximum tous les gains potentiels.»
Jean-Marc Felten
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