Calculateurs “captifs”: le CNPA libéralise l’accès

Jean-Marc Pierret
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Éviter qu’à court terme, près de 50% des réparateurs indépendants ne soient disqualifiés pour cause de calculateurs à maintenir, c’était l’objectif du CNPA. Il vient d’annoncer l'avoir atteint pour 85% du parc roulant. Et il maintient son effort pour en couvrir 100%, pour les calculateurs passés et surtout à venir. Le tout, assorti d’un module de formation dédié que les organismes de formation sont prêts à déployer…
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C’est l’un de ces défis souterrains qui déterminent l’avenir des grands équilibres en matière de réparation automobile. Le CNPA vient donc de le relever : il annonce avoir ouvert l’accès à la maintenance des calculateurs pour tous les professionnels. Si des entreprises comme Cotrolia ou Reparlab permettent déjà aux indépendants de pouvoir réparer des composants électroniques complexes, il restait en effet à libéraliser l'accès à l'entretien-réparation des calculateurs qui se multiplient dans les automobiles du parc.

Poids exponentiel des calculateurs

Car les enjeux sont de taille, confirme Yves Riou, directeur du pôle contrôle, maintenance et réparation d’un CNPA qui n’oublie pas que 82% de ses adhérents sont justement ces artisans indépendants qui doivent pouvoir rester opérationnels. Certes, il ne s'agit pas là de calculateurs captifs au sens de la législation protégeant les pièces de carrosserie. Mais ils n'en restaient pas moins inaccessibles aux réparateurs indépendants, alors même que lesdits calculateurs prolifèrent toujours plus : 50 en moyenne, 100 sur les nouveaux véhicules haut de gamme, souligne Y. Riou...

Ce n'est pourtant pas nouveau. En 2013 déjà, sur 600 000 cas de pannes recensés par un assisteur participant aux travaux du CNPA, 20% nécessitaient un téléchargement vers des calculateurs. En 2016, ce taux était monté à 40%. Et Yves Riou estime qu’en 2018, on a atteint plus ou moins 60%. «Et 50% environ sur le parc des 6 ans et plus», précise-t-il.

Rattraper le retard

Et cela ne fait encore que commencer. Car la maintenance pure et simple va bientôt devoir passer par là. «En 2021, tous les nouveaux véhicules exigeront quasi-systématiquement une maintenance des calculateurs, au risque sinon de ne pas redémarrer ou de rester en mode dégradé», annonce-t-il.

Depuis 2016, le CNPA a donc inscrit “l’accès libre” aux calculateurs parmi ses priorités. Une véritable forêt à défricher en deux ans et demi : il a fallu recenser, étudier, tester et valider autant de process que de constructeurs, autant de solutions que d’équipementiers concernés. En clair, il a fallu rattraper un retard croissant en la matière.

Rester en veille pour rester en amont

Le défi a donc été relevé au rythme de groupes de travail multiples, de tests réguliers auprès de 6 centres-pilotes et de multiples réunions. Même s'il a fallu beaucoup de temps, d'argent et d'énergie, «nous ouvrons déjà l’accès à 85% du parc roulant», se réjouit Yves Riou.

Reste bien sûr à solutionner les 15% restants, en cours de résolution, promet un Yves Riou confiant. «Nous entrons maintenant dans une phase de veille active pour rester dorénavant en amont de cette problématique. Car en matière de mise à jour et de reprogrammation de calculateurs, les technologies évoluent constamment pour pouvoir télécharger de plus en plus de données vers de plus en plus de calculateurs».

Rendre l’indépendance opérationnelle  aux indépendants

C’était d’ailleurs là l’autre enjeu pour la réparation indépendante : lui permettre de rester maître de sa propre organisation et ainsi, de son destin. Car non seulement le nombre de calculateurs est exponentiel, mais la disponibilité des réseaux constructeurs vers lesquels les indépendants sont forcés de sous-traiter les opérations pose logiquement un problème de plus en plus crucial.

«Du fait d’une masse croissante de données et du nombre de calculateurs à traiter, Il faut de plus en plus de temps pour procéder aux opérations de maintenance des calculateurs, parfois plusieurs heures, voire une nuit entière pour un seul calculateur, constate-t-il. Les réseaux constructeurs étant eux-mêmes soumis à ce type d’impératifs, les réparateurs indépendants doivent parfois attendre plusieurs semaines pour pouvoir sous-traiter une opération».

Démocratiser la compétence

Reste maintenant à rendre cette compétence accessible à tous les réparateurs qui le souhaitent. Le CNPA se dit là aussi être prêt, pour avoir associé les organismes de formation très en amont de cette petite révolution. «Pendant que nous assurions l’ingénierie technique, les organismes travaillaient déjà à l’ingénierie pédagogique en préparant des modules de formation, eux aussi testés auprès des centres-pilotes», se félicite Yves Riou.

Des modules fatalement exigeants, tant le traitement des calculateurs nécessite concentration et méthode. Mais à l’en croire, les premiers réparateurs accueillent avec enthousiasme les cessions-tests...

Jean-Marc Pierret
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