Total ou le lucratif business des lubrifiants…

Jérémie Morvan
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Le marché des lubrifiants est un marché à part. Un article très détaillé de notre confrère La Tribune explique en effet pourquoi les lubrifiants sont un segment de marché stratégique pour le pétrolier français Total. Et comment il compte bien s’y imposer…
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Lorsque l’on évoque Total, on pense immédiatement –et fort logiquement– aux carburants du pétrolier, voire à ses stations-service. Mais les plus avertis penseront également aux lubrifiants. A raison, car s’ils sont beaucoup moins "visibles", ils n’en constituent pas moins un levier de développement pour Total. Mieux : stratégique…C’est ce qu’explique un article paru le 7 juillet sur le site de notre confrère, le quotidien économique La Tribune. Le marché du lubrifiant représente la bagatelle de 100 milliards de dollars et ses volumes sont estimés à 40 millions de tonnes par an. Il est surtout émietté, avec une kyrielle d’acteurs (Fuchs, Valvoline, Champion…) et où les pétroliers –une fois n’est pas coutume– ne font pas la loi ; ils ne représenteraient même pas 40% du business total. Certes, les plus grands du secteur sont des pétroliers : Shell s’arroge ainsi 13-14% de parts de marché, et ExxonMobil en détient 11%. Mais Total, à une a priori honorable 6è place au classement mondial, fait cependant figure de petit Poucet sur ce marché, avec seulement 4,5% l’année dernière.
L’huile vaut de l’or…
Partant, pourquoi diable aller ferrailler avec cette foultitude d’acteurs ? Parce que les marges sur ce marché sont particulièrement «rentables», à en juger en tout cas par le rapport annuel du pétrolier pour l’exercice 2014. La marge brute s’élèverait en effet à 1 000 dollars la tonne lorsque celle-ci n’atteint que 70 dollars pour du carburant traditionnel…L’activité, englobée chez Total au sein de la branche Marketing & Services, progresse annuellement de 5 à 6%, faisant mécaniquement gonfler le résultat opérationnel de la branche au point de représenter 30% de celui-ci, soit 1,25 milliard de dollars ! Surtout, cette activité progresse chez Total plus vite que le marché ce qui, selon La Tribune, devrait lui permettre de doubler rapidement le 5è mondial, Chevron. Si ce n’est pas déjà fait.
… mais coûte aussi beaucoup !
Pour s’imposer sur ce marché, Total investit massivement dans la production. Ainsi en l’espace de 10 ans, Total a doublé sa production, passant de 1 à 2 millions de tonnes. Cette augmentation des capacités de production prend pour récent exemple l’inauguration d’un site flambant neuf à Singapour, la plus grande usine de lubrifiants pour le groupe pétrolier dont la capacité de production devrait atteindre 310 000 tonnes par an. Elle vient s’ajouter à un site implanté en Chine, Tianjin (200 000 tonnes par an) ainsi qu’un centre technique basé à Bombay, en Inde.L’investissement de 150 millions de dollars consentis par Total dans la région n’est pas anodin. Il reflète une vitalité du marché des lubrifiants dans la région avec une hausse des ventes de 2,5% en 2014. L’Asie-Pacifique fait d’ailleurs figure de locomotive du marché et représente d’ores et déjà 43% de la demande mondiale.La bataille devrait aussi et surtout se gagner sur le plan technologique. Et à ce titre, seuls les acteurs pouvant massivement investir dans la R&D pourront suivre l’évolution galopante des moteurs concoctés par les constructeurs. Au premier rang desquels les pétroliers.Total a en effet investi annuellement 40 à 50 M€ sur ces cinq dernières années pour rester dans la course. Car il en faut des moyens pour répondre aux exigences des constructeurs : il faut aujourd’hui faire du sur-mesure ou presque pour chaque motorisation ! Avec pour objectif principal de permettre une baisse de la consommation de carburant des moteurs.Cette technicité aujourd’hui avérée des produits du pétrolier français fait qu’il peut prétendre à une place de fournisseur chez des constructeurs en première monte. Tel est aussi le cas pour le prestigieux constructeur BMW… Au regard de l’“aura technologique” qu’un référencement auprès de la marque à l’Hélice pourrait lui amener, les portes vers d’autres grands noms allemands (Audi, Mercedes) seraient, à n’en pas douter, plus faciles à ouvrir.
Jérémie Morvan
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