Enquête sectorielle sur l’après-vente: les autres chiffres à ne pas rater

Jean-Marc Pierret
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Nos articles sur les conclusions provisoires de l'enquête de l’Autorité de la concurrence sont accessibles en cliquant ici. Mais ce rapport volumineux a aussi une vertu indirecte : celle de faire une très utile photographie chiffrée du marché français de l’après-vente. En 3 tableaux (issus soit de TCG Conseil/ICDP, soit du GIPA), les enquêteurs de l’Autorité ont ainsi quantifié globalement l’après-vente VP et VUL de moins de 3,5 tonnes, puis ventilé les grandes masses entre acteurs et types de prestations.31,2 milliards d’euros HTOn constate ainsi qu’en 2010, le secteur de l’entretien et de la réparation de véhicules automobiles a représenté un chiffre d’affaires de 31,22 milliards d’euros HT (37,34 TTC). L’Autorité de la concurrence précise que ce chiffre se ventile en un peu plus de 14 milliards HT pour les pièces (45%) et 17,2 milliards HT (55%) pour la main-d’œuvre.Le tableau ci-dessous apporte d’intéressants détails. Tout d’abord, il quantifie le fameux Do it yourself qui, associé aux accessoires, atteindrait 2,89 milliards et 9% du chiffre d’affaires national de l’entretien-réparation. On peut regretter qu’il ne descende pas dans le détail des approvisionnements pièces sur internet et aux comptoirs des grossistes et des concessionnaires. Mais ce n’est pas non plus l’objet de l’étude de l’Autorité de la concurrence...Cliquez sur le tableau pour l'agrandir
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L’activité réparation est devenue minoritaire!En revanche, le tableau permet de constater que pour la première fois en France l’activité réparation est probablement devenue minoritaire en 2011 par rapport à la maintenance! Et ce, même en intégrant les réparations liées à la carrosserie et au vitrage.C’est une évidence trop souvent oubliée pour les seules prestations mécaniques : dans les presque 19 milliards (pièces et MO) qui leur sont consacrés, la part de la maintenance préventive (entretien) a pris le pas sur la réparation. Ainsi, presque 9 milliards d’euros (pour 28% du total) sont consacrés à l’entretien contre «seulement» 6,7 milliards (21%) aux réparations.Il n’y a pas si longtemps que ce «basculement» au profit du préventif a eu lieu : le Gipa l’avait constaté en 2002 (voir notre article de 2007 «15 causes de pannes : misez sur la prévention !»). Depuis cette année-là, les professionnels qui n’ont pas su associer à leur culture du «réparateur» celle de «mainteneur» (tour de la voiture, systématisation des contrôles sur les pièces d’usure, etc.) fonctionnent à «rebrousse-marché»...Certes, on ne parle là que des réparations dites «mécaniques». Si l’on ajoute les réparations de carrosserie liées aux collisions (7,5 milliards d’euros pour le «choc» et 1 milliard pour le vitrage), on remonte à 48%. Et si l’on tient logiquement compte des réparations liées aux opérations réalisées sous garantie (0,9 milliard), l’activité des réparations au sens large s’adjugeait encore une courte majorité en 2010 avec 51% de l’activité après-vente totale.Mais c’était en 2010. Car en 2011, l’activité carrosserie a encore reculé de -7 à -8% (au moins deux fois plus vite que le marché général de l’après-vente), ce qui représenterait un manque à gagner de plus de 500 millions d’euros pour les carrossiers, pièces et main-d’œuvre, soit 1,6% de ces fameux 31,22 milliards. Juste de quoi faire passer la réparation, toutes activités comprises, sous la barre symbolique des 50%...Les MRA pas si bon marché que ça?Au détour d’un autre tableau, un chiffre inattendu : le Gipa constate que, par rapport aux prix des prestations dans le réseau constructeurs (RA1+RA2), la facture d’un MRA n’est en moyenne que 16% sous celle d’un réparateur de marque alors même que son taux de main d’œuvre est inférieur d’environ 30% !Dans le détail, on découvre même qu’une révision saisonnière coûte le même prix... et qu’une panne revient même 5% plus cher chez un MRA !Cliquez sur le tableau pour l'agrandir Les indépendants stagnent depuis 5 ans!Le tableau ci-dessous détaille les parts de marché de chacun, en volume et en valeur. On constate ainsi les indépendants sont majoritaires en nombre d’entrées atelier mais plafonnent à environ 47% de la valeur du marché après-vente.Cliquez sur le tableau pour l'agrandirOn peut regretter de ne pas avoir le détail en valeur concernant l’ensemble des acteurs. On aurait sûrement pu calculer le chiffre d’affaires théorique moyen de chaque famille de pros et comparer le résultat aux réalités du terrain. Si l’on s’essaie à l’exercice pour les RA1 et RA2 dont les valeurs spécifiques sont renseignées, on obtient ainsi en 2010 un chiffre d’affaires moyen de 2,318 millions d’euros (Pièces+MO) par atelier de concessionnaire et de 0,558 million d’euros par atelier de RA2. Amis des réseaux constructeurs, à vos calculettes....Par ailleurs, l’Autorité de la concurrence s’interroge sur les raisons qui font que la part de marché des indépendants stagne depuis 2005, bon an mal an, en-deçà des 50% «alors qu’ils progressaient jusqu’alors». La réponse sera peut-être lisible dans les conclusions définitives de l’enquête de l’Autorité de la concurrence en juillet prochain...Autre chiffre intéressant de l’étude : 92% du parc sont détenus par des particuliers en France, ce qui signifie, explique l’Autorité, «une demande souvent captive, privilégiant la proximité du réparateur et les relations de confiance, assez peu à même de mettre en concurrence les offreurs».Les réseaux de marque faibles dans l’ancien Enfin, l’étude a également le mérite de resituer les enjeux généraux de l’après-vente en matière de territoires réservés, même si l’Autorité de la concurrence regrette de ne pas disposer en la matière de chiffres assez précis pour pouvoir descendre dans le détail des parts de marché et y traquer d’éventuels cloisonnements suspects.Elle voit en tout cas dans trois estimations des parts de marché constructeur qu’elle considère comme fiables (55% en réparation-collision, 20% en bris-de-glace et 20% en pneumatiques) «des disparités importantes de positions du canal constructeur selon les segments d’opérations, ce qui confirme l’existence d’un certain cloisonnement du secteur et le peu de concurrence frontale entre les différents types d’acteurs».Elle s’arrête tout particulièrement sur la segmentation du marché après-vente selon l’âge du véhicule (tableau de TCG Conseil ci-dessous). Après avoir constaté la toute-puissance des réseaux de marque sur les véhicules récents (ils s’adjugent 83% des prestations après-vente des «moins de 2 ans» et 67% des «3 à 4 ans»), l’Autorité s’étonne de voir ces mêmes réseaux dévisser dès les «5 à 6 ans» dont ils ne détiennent plus que 52% et s’effondrer sur le parc très ancien.Comme s'il existait des stratégies de captation de certaines catégories de clients, du type contrats de garantie illegaux, comme l'explique UFC-Que Choisir qui a entrepris une procédure en ce sens contre les constructeurs français (voir "Garanties: «Que Choisir?» attaque les constructeurs en justice") ? Là encore, on espère une réponse circonstanciée dans le rapport définitif de juillet...Cliquez sur le graphique pour l'agrandir

Fiche 1 : Les Français et l'automobileFiche 2 : Comment est organisé le secteur de l'entretien et de la réparation ?Fiche 3 : La protection des pièces visibles et ses conséquencesFiche 4 : Le prix des pièces détachéesFiche 5 : Quelques chiffres clés sur le secteur de l'entretien et de la réparation automobileFiche 6 : La fabrication et la distribution des pièces de rechangeFiche 7 : Les sujets soumis à consultation publique

Jean-Marc Pierret
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