Le marché des batteries, premier à redémarrer après le confinement ?

Romain Thirion
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De tous les produits qui composent les stocks des distributeurs, la batterie est sans doute celui qui, une fois le déconfinement acté, devrait voir ses ventes redémarrer le plus vite. Car, déjà, le rebond de commandes se fait sentir alors même que l'activité des ateliers reste faible, et les fournisseurs du marché de la rechange fourbissent déjà leurs armes.
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Le confinement a drastiquement réduit l'activité des ateliers d'entretien-réparation depuis son entrée en vigueur le 16 mars dernier. Cependant, les réseaux de garages et les réparateurs sans enseigne qui ont décidé de garder leur baies ouvertes, en prenant toutes les mesures sanitaires possibles, répondent avant tout aux besoins des professionnels et particuliers ayant un impérieux besoin de rester mobiles.

Or, en cette période particulière, les pannes peuvent arriver, et deux types de pièces sont particulièrement ciblés par les services de dépannage mis en place par les différentes enseignes : les pneumatiques, naturellement, et les batteries.

Concernant ces dernières, d'ailleurs, il semblerait que le marché n'ait pas attendu la fin du confinement pour reprendre de la vigueur. Ainsi, Nicolas de Gaudemont, CEO d'Originauto, spécialiste de la distribution BtoB en ligne, nous annonçait, il y a quelques jours, l'essor marqué des ventes de batteries par rapport au milieu du mois de mars, moment de l'entrée en vigueur des mesures de restriction de circulation. Et les fournisseurs du marché de l'après-vente ne contredisent en rien cette affirmation, même si de leur côté, la logistique recommence à frémir.

Un flux logistique qui se maintient

«Nous avons enregistré une baisse des ventes mais notre flux reste correct, nous espérons un vrai regain d'activité dès la fin du confinement, du fait du nombre de véhicules restés immobilisés», espère Arnaud Lesud, directeur des ventes France et export d'Exide Technologies.

«Les distributeurs continuent de vendre des batteries malgré le confinement, confirme Antonio Magnacca, responsable France pour le fabricant italien Midac. Pour l'instant, ils ont encore du stock mais dès la reprise donc nous ne leur livrons pas énormément, mais nos ventes devraient remonter rapidement.» L'homme affirme que le chiffre d'affaires France de Midac a baissé fortement depuis le début du confinement, mais que la casse a pu être limitée malgré tout.

Et, un brin optimiste, il souligne que «l'arrêt prolongé des véhicules durant le confinement va obliger bon nombre d'automobilistes à recharger leur batterie, voire à la remplacer». Agent commercial du fabricant roumain Rombat en France, Urbain Chassaing précise, en outre, que «le parc roulant français est ancien et les ventes du premier trimestre 2020 étaient en baisse par rapport aux années précédentes, à cause d'un hiver très doux, ce qui va conduire à un report des ventes et la durée d'immobilisation des véhicules risque, en outre, de décharger profondément les batteries VL. Ce n'est pas pour rien que nos distributeurs annoncent de très bonnes ventes de batteries en avril et que les dépanneurs soient sollicités pour venir en aide aux véhicules en panne de batterie».

Une aubaine pour les fabricants de chargeurs aussi

Urbain Chassaing voit l'immédiat post-confinement de manière positive pour le marché des chargeurs de batterie également. «En tant que fondateur de SC Power, qui fabrique des chargeurs, j'ai eu la confirmation de la part de nos distributeurs que les chargeurs se sont bien vendus même au mois de mars, et de façon encore plus importante sur les sites de vente BtoC de pièces et d'équipements en ligne», précise-t-il.

Cependant, Nicolas Gutleben, directeur de la filiale France du fabricant de batteries autrichien Banner, estime que « les chargeurs ne sont pas très répandus chez les particuliers, qui n'ont de toute façon pas le réflexe de recharger la batterie de leur véhicule, même si nous rappelons fréquemment l'importance de le faire, ce qui annonce une foultitude de batteries vides ou presque une fois le confinement levé».

Parce que même les batteries récentes, sans tourner, se déchargent fortement. «J'explique souvent qu'une batterie neuve et jamais montée se décharge au bout d'un an, annonce Arnaud Lesud. Alors une batterie qui a déjà beaucoup subi de cycles et qui, d'un coup, ne roule plus, subit un contrecoup sévère.» Et surtout, le désulfatage de celle-ci n'entre plus en action. «Une batterie qui ne tourne pas dispose d'un niveau de charge plus bas, si elle est fortement équipée, elle risque de subir une décharge encore plus forte, et les trajets courts effectués durant le confinement ne suffisent pas à casser la sulfatation qui se produit à l'intérieur», confirme Nicolas Gutleben.

Les batteries Stop & Start également touchées

Un phénomène de décharge profonde «existant également sur les batteries AGM et EFB» destinés aux véhicules Stop & Start, selon Urbain Chassaing, qui voient leurs performances baisser en-dessous d'un certain niveau de charge. Arnaud Lesud tempère toutefois ce constat : «les batteries AGM et EFB sont conçues pour absorber davantage de contraintes ; en revanche, il y a un nombre non négligeable de véhicules équipés de systèmes Stop & Start qui ont vu leur batterie AGM ou EFB remplacée par une batterie standard, contre toute préconisation. Pour ces véhicules, la décharge va être effectivement beaucoup plus rapide».

Quoi qu'il en soit, l'interruption du marché de la batterie, même plus courte que celle qui touche les autres marchés de l'après-vente, ne devrait pas bénéficier à des acteurs exotiques. Pas de raison, en effet, de voir un afflux de batteries chinoises sur le Vieux Continent, même si l'Empire du Milieu a repris la production plus tôt que les usines européennes. «La Chine produit essentiellement des batteries pour son marché domestique, pour ce qui est de la technologie plomb-acide, confirme Urbain Chassaing. En ce qui concerne la technologie lithium-ion, c'est une toute autre histoire car le pays dispose du savoir-faire, des capacités de production et a la main sur les terres rares nécessaires à leur fabrication.»

L'après-vente servie avant la première monte ?

Mais puisque le véhicule électrique ne risque pas d'être la principale alternative de Français touchés dans leur pouvoir d'achat par la crise économique née du confinement une fois ce dernier levé, ce sont bien les besoins des véhicules à moteur thermique qui devront être adressés.

«95% du parc roulant européen reçoivent des batteries produites en Europe, confirme Nicolas Gutleben. Les sites de production ont de la marge et, en outre, il y a de la disponibilité puisque les chaînes d'assemblage de véhicules neufs sont, pour la plupart, à l'arrêt»

Le volume de batteries qui leur était destiné peut être directement réaffecté à l'après-vente, qui risque d'en consommer davantage dans les mois qui viennent que d'habitude, pendant que la production auto, elle, risque de rester assez longtemps atone...

Romain Thirion
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