Etude Roland Berger : comment l’après-vente peut sortir grandie de la crise…

Jérémie Morvan
Image
Elle est intéressante, cette étude réalisée par le cabinet de consulting Roland Berger. Elle vient en effet apporter un éclairage plutôt optimiste sur le devenir de l'après-vente. Surfant sur l’inertie du parc et les nécessaires besoins de mobilité, certains de ses acteurs, s’ils négocient habilement les mutations profondes du secteur, pourraient même bénéficier d’opportunités...
Partager sur

L’heure n’est pas à la franche rigolade. Confinement lié à la propagation du coronavirus oblige, les frontières se ferment, les usines sont à l’arrêt. Le prix du baril de brut vient d’atteindre son plus bas niveau depuis 17 ans tandis que les bourses dévissent les unes après les autres. Selon JP Morgan, le PIB de la zone euro devrait reculer de 22% au second trimestre tandis que taux de chômage pourrait enregistrer une hausse de 1,6 % dans les pays développés...

Pourtant, dans ce marasme ambiant, une récente étude assez maladroitement baptisée «Covid-19 : l’opportunité de la rechange indépendante» (Covid-19 : the Automotive Independant Aftermaket opportunity), menée par le cabinet de consulting Roland Berger, apporte quelques espoirs bienvenus pour la filière indépendante. Une filière où le cabinet y voit en effet la possibilité de sortir de cette crise sanitaire plus fort, plus agile, avec de nouveaux atouts.

Un marché VN en berne

Ce n’est pas un scoop : la période de confinement généralisé en Europe lamine littéralement les volumes de vente VN. Tandis que les concessionnaires ne vendent plus, les constructeurs ont tous mis leurs usines à l’arrêt. Et bien qu’il soit encore impossible de savoir quand la période de confinement prendra fin, les premières projections de ventes VN sur l’année sont indéniablement marquées du sceaux de ce mars et cet avril qui seront blancs…

Le cabinet a identifié trois effets susceptibles d'impacter plus ou moins durablement le marché VN selon les réponses que les constructeurs mais aussi les clients automobilistes voudront (pourront?) apporter. D’abord au niveau de la production, aujourd’hui à l’arrêt et dont on ne sait pas lorsqu’elle pourra véritablement et pleinement reprendre. Ensuite, au niveau de la demande, dont on ne sait pas quand (et si) elle reviendra à la normale. Enfin, l’innovation va elle aussi être impactée, avec notamment des cycles de lancements de nouveaux modèles significativement allongés et une réduction des investissements.

In fine, sur la base de trois scenarii (en forme de V, de U ou de L, selon le délai et la vitalité de la reprise), la baisse de la production automobile en Europe sera au mieux de -12% en 2020 ; au pire, de -38 %. De 17,9 millions de VP écoulés en Europe l’année dernière, le marché devrait fondre à 15,8 millions d’unité pour le scenario optimiste, et même à 11,1 millions dans le pire des cas…

Inertie du parc, résilience de l’aftermarket

Dans ce contexte de baisse des ventes de VN, Roland Berger considère que l’aftermarket a plus d’un atout en main. D’abord parce que, inertie du parc aidant, le secteur de la rechange se trouve autrement moins exposé que l’OE au choc économique actuel. Car après l’arrêt brutal de la demande durant la période de confinement, la baisse des ventes VN sera synonyme de vieillissement du parc et donc de davantage d’opérations d’entretien, menant à un accroissement de la part de marché de la rechange indépendante sur le marché de l’après-vente.

En 2008, lors de la crise financière des subprimes, le même ralentissement net des ventes VN avait pu être observé ; de la même manière, le parc avait lui opposé une résistance a choc économique par effet d’échelle. Comprendre : le marché de l’après-vente n’est pas à l’abri de la crise ; mais il est en revanche moins exposé...

 

Les 3 scenarii"

Le cabinet de consulting estime ainsi que, dans les trois scenarii envisagés en termes de ventes VN, le marché de l’après-vente reculera autrement moins que celui du VN.

Dans le premier cas (scenario en V, envisageant une baisse des ventes VN comprise entre 15 et 20% en 2020 grâce à une reprise rapide d’activité dès la fin du second trimestre 2020), le marché de l’après-vente ne devrait ne reculer ‘que’ de 5 % dans le pire des cas. Dans le deuxième scenario (en U c’est à dire où la reprise se fait attendre jusqu’au dernier trimestre de l’année), avec une baisse des ventes de VN comprise entre 20 et 25 %, le recul pour l’après-vente ne devrait être 'que' de 5 à 10 %.

Dans le 3ème cas (baisse VN de -38%), l'après-vente chuterait d'environ 10 à 15%.

Mutations : saisir les opportunités

Ce que retient aussi cette étude, c’est que les mutations engagées sur la marché vont aller en s’accélérant, la crise sanitaire servant de catalyseur. Ainsi, le phénomène de concentration initiée ces dernières années sur un marché européen de la pièce encore très morcelé va s’amplifier (voir aussi «Nexus Automotive International : «n’exclure aucun des futurs post-crise possibles )»). A cet égard, seuls les acteurs les plus solides financièrement pourront se positionner et être à même de saisir des opportunités.

Par ailleurs, la crise sanitaire aura montré les limites de la pensée unique de globalisation. Le jeu de maillons mis en place dans une stratégie de stocks limités et de production à flux tendu est venu mettre cruellement en lumière notre dépendance vis-à-vis de la Chine.

Lorsque celle-ci a commencé à tousser (et à arrêter de produire), tout la chaîne s’est enrhumée. Aussi, à l’ère de la globalisation devrait succéder celle de la «glocalisation». En moins sibyllin : penser global, produire local. Ce changement de paradigme devrait impacter toute la chaîne logistique selon Roland Berger, avec notamment une remise à plat de la question des stocks et du schéma logistique de chacun, mais aussi de celle de la relocation des productions. Ou au moins d'une partie d’entre elles...

Jérémie Morvan
Partager sur

Inscrivez-vous gratuitement à nos newsletters

S'inscrire