Libre choix – FNAA : une victoire en forme de « top départ »

Jérémie Morvan
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L’entrée en vigueur de l’arrêté d’application du libre choix du réparateur est une avancée pour la profession de carrossier. Une condition nécessaire selon la FNAA mais malheureusement pas suffisante pour les entreprises de réparation-collision qui doivent plus que jamais savoir communiquer et "se vendre". Pour mieux fidéliser.

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La promulgation de l’arrêté d’application du libre choix du réparateur pour l’automobiliste dans le cadre d’un sinistre signe une étape décisive dans le combat de longue haleine qu’ont mené les diverses organisations professionnelles de la réparation-collision face aux sociétés d’assurance. «Il s’agit à n’en pas douter d’une victoire collective, souligne Aliou Sow, secrétaire général de la FNAA. Sans le travail de toutes les fédérations, on n’aurait jamais abouti à ce résultat.»Mais beaucoup reste encore à faire. C’est en substance le message qu’a adressé l’organisation professionnelle et sa branche carrosserie à l’occasion d’un point presse organisé mercredi dernier. Revenant sur la genèse de la Loi Hamon du 17 mars 2014, qui remonte au 14 mai 2008 (date de la signature de la première Charte des relations assureurs-réparateurs, laquelle comportait déjà en son article 13 : «Le libre choix du réparateur par l’assuré constitue un principe essentiel de la relation entre les assureurs, les assurés et les réparateurs. Ce principe est mis en œuvre dans la relation entre l’assureur et son assuré. Dans le cadre de sa relation avec l’assuré, l’assureur peut proposer des réparateurs»), la FNAA, partie prenante de la première heure à l’élaboration du texte de loi, souligne en effet que beaucoup reste encore à faire pour que les professionnels en ressentent des effets bénéfiques sur le terrain !
La FNAA veut ester vigilante
Et si elle dit «se contenter» de cette avancée pour la profession, selon Aliou Sow, l’organisation n’en reste pas moins vigilante quant à son application sur le terrain. La rédaction de l’arrêté d’application, entré en vigueur le 1er janvier dernier, reste en effet imparfaite en ceci que l’arrêté ne garantit qu’imparfaitement l’information du libre choix à l’assuré. Ainsi par exemple, il faudra un certain temps avant que tous les constats en possession des automobilistes portent la mention les informant du libre choix, de même que ce droit à l’information n’est pas expressément imposé aux plateformes de gestion de sinistre !Surtout, elle se projette sur l’avenir qui, lui, n’est pas (encore) gagné pour les carrossiers… Car à peine l’arrêté vient-il d’entrer en vigueur que Serge Valet, président d’honneur de la branche Carrosserie à la FNAA, liste 4 points sur lesquels les assureurs commencent d’ores et déjà à mettre la pression pour continuer à les orienter vers leurs réparateurs conventionnés… Le règlement direct, devenant de plus en plus problématique pour les carrossiers non conventionnés, des assureurs commencent à se montrer plus sourcilleux sur la question de la facturation d’un véhicule de prêt (rappelant à l’envi qu’il est bien sûr gratuit si l’assuré se rend chez un réparateur agréé…). Taux horaires et menaces sur la franchise sont également des armes de plus en plus usitées par les sociétés d’assurance pour faire pression sur leurs assurés…
Offrir une alternative
Le principe du libre choix étant désormais gravé dans le marbre, la FNAA s’est attachée à construire une alternative aux carrossiers. Cela commence par un environnement plus propice ; c’est la raison d’être du partenariat signé en début d'année avec les associations de consommateurs Familles de France et la Ligue des droits de l’Assuré. L’objectif est bien évidemment de porter l’information jusqu’au consommateur final, avec des réunions en région. Il est aussi, en prenant une posture nouvelle qui est celle de la défense des consommateurs, de mieux pouvoir s'extraire du cliché de syndicat professionnel défendant son pré carré dans lequel on a inévitablement tendance à l'enfermer.Mieux encore : ce partenariat, qui doit pouvoir donner plus de poids au message commun de ces trois organismes, va aussi permettre à la FNAA d’utiliser le réseau de ses deux partenaires pour obtenir des remontées terrain de la part des automobilistes-assurés, en plus de celles de ses adhérents carrossiers, quant à l’application effective du libre choix par l’assuré…Pour aider les réparateurs, la FNAA met aussi à leur disposition un kit baptisé Mon Carrossier Confiance et lancé dès octobre 2014, quelques mois avant même l’entrée en vigueur de l’arrêté d’application ! Il repose sur la notion de professionnalisme (il est en effet préférable de répondre à la nouvelle norme AFNOR), pour une intervention de qualité, et sur la notion de service de proximité. Déjà adopté par une centaine de carrossiers, le kit comprend bien évidemment un volet communication, nécessaire pour continuer à informer, sur le terrain, les automobilistes encore (trop) peu au courant de ce droit.Mais il ne se limite pas à cela : «Mon Carrossier Confiance est une démarche commerciale, basée sur un ensemble de services aux automobilistes», confirme Serge Valet. Le kit, proposé aux carrossiers pour 175 €, contient donc affiches, vidéo, cravates de rétroviseur et autres flyers quizz pour informer les clients de leur droit. Il contient également des constats amiables comportant la mention du libre choix à distribuer aux clients repartant de l’atelier. Il contient surtout une lettre type avec un argumentaire expliquant que le professionnel peut s’occuper d’un sinistre de A à Z, car «ce que recherchent avant tout les automobilistes après un accident, c’est bien sûr une réparation de qualité, mais aussi qu’ils n’aient pas à s’en occuper», rappelle Aliou Sow. Dans cette lettre, un bon d’achat de 100 € valable trois ans est par ailleurs proposé au client automobiliste.C’est une première étape commerciale, mais une étape importante comme le souligne Serge Valet : «le professionnel va travailler son fichier client pour les informer, les fidéliser et en réactiver certains». Car les mentalités doivent changer, et il faut désormais savoir se faire commerçant en plus d’être artisan…
Et après ?
Informer encore et toujours le consommateur final, créer un environnement propice et des outils afin que le professionnel se réapproprie la relation client est une chose. Un prérequis.Car restent d’importants dossiers à traiter pour que le principe du libre choix ait un réel impact. A commencer par la question du règlement du réparateur. Si la cession de créance peine à se démocratiser en effet, c’est parce que son formalisme s’est durci sérieusement au point de ne plus pouvoir être réellement utilisé dans la pratique par les réparateurs. En effet, lorsqu’une simple lettre recommandée avec accusé de réception était traditionnellement admise par les assurances, il semble qu’une jurisprudence née en 2012 impose désormais que le règlement direct soit signifié à l’assureur par voie d’huissier ! Autrement plus lourd (et onéreux) qu’un envoi postal…Autre dossier : le rôle économique de l’expert. Si la FNAA ainsi que la FFC-Réparateurs avaient quitté la table des négociations avec l’ANEA, c’était parce que celle-ci ne donnait aucun gage quant à l’ouverture du dossier épineux du rôle économique dévolu aux experts… Peut-on espérer une réconciliation ? Le climat semble en tout cas progressivement se pacifier : «Une prochaine réunion doit avoir lieu dans le courant du mois de février», glisse Jean-Paul Veyrac, président de la branche Carrosserie de la FNAA.Autre problématique, mais sur laquelle la FNAA n’a aucune emprise : la question du libre choix de l’expert. Nos divers articles concernant le climat actuel de la profession (et les commentaires associés), mettent en évidence des cabinets pressurés par les sociétés d’assurance. S'ils recouvraient un tant soit peu de marge de manœuvre, les échanges sur le rôle économique de la profession s’en trouveraient, à n’en pas douter, autrement plus sereins et constructifs !
Jérémie Morvan
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